jeudi 1 octobre 2015

Les lapereaux

En mai, j'ai couru deux marathons à trois semaines d'intervalles. Un plan ambitieux mais une expérience magnifique qui s'est déroulée à merveille.

Deux marathons comme lapine, Toronto en 4:45 et Ottawa en 5:00. L'automne précédent, j'ai aussi lapiné le marathon de New York en 4:45.

Courir pendant tout ce temps, c'est spécial. Pas tant pour la course que pour l'expérience humaine qui l'accompagne. Imaginez courir à côté d'inconnus pendant près de 5 heures. Votre rôle comme lapin, c'est de les amener au fil d'arrivée. Vous gérez les vitesses de course mais vous devenez un point d'attache, une source de motivation. Vous devenez leur meilleur ami. En tant que bon meilleur ami, vous les encouragez. Vous donnez des conseils, vous expliquez votre façon de voir les choses, vous racontez certains aspects de votre histoire. À leur tour, vos nouveaux meilleurs amis vous confient la leur.

À chaque marathon comme lapine, je me suis attachée à des inconnus qui sont devenus et restés des amis. C'est magique. Ils ont vécu un exploit, ils ont atteint leur objectif et j'ai eu la chance d'être à leurs côtés pour le vivre.

Mon expérience de lapine la plus spéciale, je l'ai vécue au tout petit marathon Goodlife de Toronto. Peu de participants, je ne savais pas si j'aurais un groupe avec moi. Mais oui, et mon plus beau groupe du début à la fin d'une course, rien de moins!

Des coureurs expérimentés qui étaient, pour la plupart, à leur premier marathon. Qui se connaissaient bien et qui savaient que 4:45 était réaliste pour eux. On a échangé tout le long, partagé encouragements et tranches de vie.

Tout allait bien, jusqu'à ce que je leur dise que je ne voulais plus les voir! Parce que c'est bien beau de courir avec un lapin mais si moi, mon objectif est de terminer avec précision, le leur, c'est de finir forts et de donner le meilleur d'eux-mêmes. Je savais qu'il leur restait de l'énergie pour gagner quelques secondes ou même une minute ou deux alors, pour les derniers kilomètres, je leur ai dit de me laisser tomber.

Ça n'a pas été facile! "On a fait ça avec toi, on ne peut pas s'en aller!" "On veut finir avec toi!!"

J'ai dû promettre que je tiendrais ma pancarte bien haute au fil d'arrivée, qu'ils me repèreraient facilement et qu'on se verrait tous célébrer et prendre une photo de groupe. On a fixé un point de ralliement. J'ai promis mille fois avant que finalement, ils me croient.

Ils sont partis doucement. Ils n'accéderaient pas trop, mes lapereaux :) Je les ai mêmes vus jeter des regards inquiets derrière eux, comme s'ils pensaient que j'allais abandonner au kilomètre 38 et rentrer chez moi!

Mais ils ont fini par me laisser! 

Juste avant, j'ai entendu deux coureurs parler. Lui, petit, osseux, avec piercings et tatouages partout sur le corps. Elle, grande et très costaude, avec jupette et visière roses. Ces deux-là, dans un bar, ils ne s'échangent clairement pas leurs numéros. Mais lui, je l'entends qui lui dit, à elle : "Je voulais te dire merci. Je n'avais jamais pensé que je courrais avec un groupe comme ça aujourd'hui et je n'avais jamais imaginé à quel point ça me donnerait de l'énergie et ça m'aiderait à passer au travers. Le groupe m'a permis de réussir mon premier marathon et tu en as été une partie importante, merci."

Et elle a répondu je ne sais pas quoi parce qu'ils accéléraient. 

Je les ai trouvés tellement beaux, j'en ai été un émue, j'avoue.

Pourquoi est-ce que j'adore courir comme lapin?

Pour ça. Pour ces moments-là.

Et bien sûr qu'on s'est vus au fil d'arrivée, qu'on a célébré et pris plein de photos! :)

A+, les athlètes!

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