11 octobre 2015, mon deuxième marathon de la série des « World
Majors ».
Pour une rare fois depuis longtemps, je courais pour moi,
pas comme lapine, et pour faire un temps. Un bon temps, mon record.
L’objectif initial était sous les 4 h. J’ai été une reine
de la discipline tout l’été 2015 et me suis entraînée très fort, selon un plan
personnalisé fourni chaque semaine par mon entraîneur, le pro des pros.
À un point pendant l’été, ça allait trop bien… Je lui ai
envoyé un courriel timide… Penses-tu que… Peut-être… Je pourrais faire 3 h 50?
Du moins 3 h 55?
Il m’a répondu qu’il n’avait aucun doute. Qu’il me
croyait capable de faire 3 h 50 et qu’il n’hésitait pas une seconde à me le
recommander.
… *criquets*
Moi. Pas sportive. Il dit que je peux faire 3 h 50, qu’il
en est certain.
Alors je suis partie, comme une grande fille, toute seule
à Chicago, pour courir un marathon en 3 h 50. Avec mes souliers et la peur au
ventre. Je n’avais dit mon objectif à personne, seul mon coach le savait. Parce
que je n’osais pas y croire.
Courir un marathon sans être lapine, ça ne m’était pas
arrivé depuis un bon moment. C’est stressant! On passe toute la course en
sachant que, si on ralentit, on passera à côté de l’objectif. On pense à
maintenir la vitesse, maintenir la vitesse, maintenir la vitesse…
Ce qui est vraiment spécial, à Chicago, c’est le nombre
de spectateurs et de bénévoles sur le parcours. 1 million de spectateurs! Je
portais la camisole de mon club de course, les Vikings, et j’ai eu l’impression
que chaque spectateur a crié « GO Vikings! » Ça m’a donné des ailes. Tout
comme de savoir que plein de gens, à la maison, me suivaient via le net.
Un club de course, c’est un club d’entraînement, mais ça
devient plus que ça. C’est rempli de coureurs solidaires qui comprennent ce qu’on
vit quand on se lance dans le vide pour 42,2 kilomètres. Parce que les autres
personnes, les non-marathoniens, ne comprennent jamais véritablement… Un club
de course, c’est une petite famille parallèle qui se crée. J’étais toute seule
mais j’avais un petit peu de leur énergie avec moi.
Ce n’est que vers le dernier mile que j’ai commencé à
assimiler le fait que c’était dans la poche. J’allais l’avoir, mon 3 h 50. J’allais
même rentrer un peu avant! Je me suis sentie capable d’accélérer un brin. J’ai donné
tout ce qu’il me restait d’énergie.
À 400 mètres de la fin, il y avait une pancarte
mentionnant qu’il ne nous restait plus que cette distance à parcourir. J’avais
hâte de croiser celle du 300 mètres… Qui m’a semblée tellement, mais tellement
éloignée!!! Je me souviens avoir grogné dans ma tête. Depuis quand c’est long
comme ça, 400 mètres?!? Il est où, ce fil d’arrivée?!?
Ensuite, je ne me souviens plus de beaucoup de choses. J’ai
croisé le fil d’arrivée et traversé la mer de bénévoles qui prennent chacun en
charge un aspect de l’après-course. Un te donne une bouteille d’eau, un te met
une couverture d’aluminium sur les épaules, l’autre appose un autocollant pour
que ta couverture tienne en place, un te donne à manger, un te met ta médaille
dans le cou, un te prend en photo… Ça dure comme ça pour une bonne distance…
J’ai traversé cette zone dans un état second, dans une
espèce de flottement.
Et quand je suis arrivée au bout, toute seule, j’ai
pleuré. 3 h 48!!! Plus de 20 minutes retranchées à mon meilleur temps de
marathon!
Maintenant, mon problème, c’est que je sais que je peux
faire mieux que ça. Chicago, c’est tellement gros qu’on passe sa course à
zigzaguer pour dépasser. Tellement qu’à la fin, ma montre disait que j’avais
couru un mile de plus que la vraie distance! Je sais que je n’ai pas couru de
la façon la plus efficace à cause de la foule et que, si j’avais pu maintenir
une bonne trajectoire constante, j’aurais gagné du temps…
Alors je m’entraîne fort depuis le début de 2016 pour retrancher
encore quelques minutes à mon record!
Mon objectif?
C’est un secret… ;) Parce que l’histoire se répète à
chaque fois…
En route vers Toronto, 1er mai!
A+ les athlètes!